par Mayte Parada, M. Sc. A., Ph. D.
Les adolescents passent un temps considérable devant des écrans pour plusieurs activités comme les jeux vidéo, les médias sociaux, le visionnement d’un film ou d’une série, et parfois même leurs devoirs (n’est-ce pas ?). En raison de la place qu’occupent les écrans dans notre vie quotidienne, plusieurs chercheurs se sont naturellement penchés sur les effets de cette nouvelle réalité sur le développement des jeunes. Au cours des dernières années, de multiples études ont établi une relation entre le temps passé devant un écran et la dépression. Cependant, un groupe de chercheurs a reconnu qu’un bon nombre de ses études étaient méthodologiquement limitées et que leurs résultats étaient incohérents. L’objectif du groupe était de déterminer si le type d’activité passée à l’écran (que ce soit les médias sociaux, la télévision, les jeux vidéo, ou autre) a un poids dans le lien avec la dépression.
L’étude
L’étude, publiée dans JAMA Pediatrics, a été menée par des chercheurs du département de psychiatrie de l’Université de Montréal, du Centre de recherche du CHU Sainte-Justine, à Montréal, et de l’Université de Nouvelle-Galles du Sud, à Sydney en Australie. L’étude a été réalisée auprès d’adolescents de la première à la cinquième année du secondaire de 31 écoles situées à Montréal. L’échantillon était composé de 3659 adolescents au total, suivis sur une durée de 4 ans. Les élèves ont répondu à des questions sur la présence de symptômes dépressifs, et ont noté le temps passé quotidiennement à jouer aux jeux vidéo, à utiliser Facebook, Twitter ou d’autres médias sociaux, à regarder des émissions ou des films à la télévision ou à l’ordinateur, et à faire d’autres activités à l’ordinateur. Pour terminer, les élèves ont également répondu à des questions sur leur estime de soi et leur niveau d’activité physique.
L’étude s’est également penchée sur le sexe et le statut socioéconomique. Les résultats ont révélé que les symptômes dépressifs rapportés étaient plus graves chez les filles et chez les adolescents au statut socioéconomique défavorisé. De façon générale, le temps passé devant un écran et les symptômes de dépressions ont augmenté au fil des années.
Les résultats
L’étude a rapporté deux types d’associations entre le temps d’écran et la dépression : le premier est fondé sur les changements observés au cours des 4 années d’étude ; le deuxième, au cours d’une année donnée. Une forte utilisation des réseaux sociaux au cours des 4 années, et toute augmentation de l’utilisation des médias sociaux au cours d’une année donnée sont associées à des symptômes accrus de dépression. Ces deux associations ne s’appliquent pas aux autres types d’usage d’écrans. Il est intéressant de noter que les jeux vidéo n’étaient pas associés à des symptômes dépressifs.
Les résultats de l’étude révèlent également qu’une augmentation de l’utilisation des médias sociaux ou de la télévision est liée à une diminution de l’estime de soi au fil des ans. En outre, plus l’estime de soi est faible, plus les symptômes de dépression sont graves. Une augmentation du temps passé sur les médias sociaux ou à la télévision d’aussi peu qu’une heure, que ce soit sur la période de 4 ans ou pendant une année donnée, a pour effet de diminuer significativement l’estime de soi. L’activité physique n’a pas été associée à la dépression.
Comment les médias sociaux et la télévision affectent-ils l’humeur ?
En s’appuyant sur les données de l’estime de soi, les chercheurs ont émis l’hypothèse qu’une exposition répétée aux images irréalistes et idéalisées véhiculées sur les médias sociaux et à la télévision contribue à réduire l’estime de soi. Particulièrement chez les adolescents qui présentent des symptômes dépressifs, l’utilisation des médias sociaux peut exacerber une humeur et un état d’esprit dépressifs.
Les chercheurs ont reconnu l’importance de cerner le type de contenu auxquels les adolescents sont exposés sur les médias sociaux et à la télévision, et par conséquent, ont indiqué que de nouvelles études sont nécessaires pour comprendre ses facteurs. Toutefois, la présente étude, la première de la sorte, met en lumière l’aggravation des symptômes dépressifs liée à l’utilisation des médias sociaux et de la télévision.
Source :
BOERS, Elroy, et collab. « Association of screen time and depression in adolescence », JAMA Pediatrics, 15 juillet 2019. doi : 10.1001/jamapediatrics.2019.1759